LE SOUS-TITRAGE EN TEMPS RÉEL

Le sous-titrage en temps réel est un maillon essentiel de l’accessibilité pour les personnes malentendantes. Transformer la parole en texte, en temps réel… c’est le fascinant métier de nos interprètes de l’écrit.

Le sous-titrage en temps réel - vélotypie - Le Messageur - Le métier d'interprète de l'écrit

Dans de nombreuses situations, il est essentiel de mettre en place un sous-titrage en direct pour que les personnes sourdes ou malentendantes puissent suivre et participer à égalité de chances. Depuis ses débuts en 2012, Le Messageur intègre ce service dans son activité : toute une équipe d’interprètes de l’écrit, salariés et indépendants, réalise le sous-titrage en temps réel de réunions, d’événements et d’appels téléphoniques. Un métier relativement récent, peu connu, qui souvent passionne ceux qui l’exercent… Zoom sur les coulisses du métier d’interprète de l’écrit.

En quoi consiste le sous-titrage en temps réel ?

Sous-titreur ? Opérateur de sous-titrage ? Adaptateur ? Transcripteur ? Interprète oral / écrit ? Au Messageur, nous avons choisi de parler « d’interprète de l’écrit ». L’interprète de l’écrit “prête ses oreilles” aux publics sourds et malentendants pour leur restituer en direct les propos tenus à l’oral, en propos écrits, adaptés aux codes de l’écrit, sans pour autant modifier leur sens. En cela, il s’agit d’une traduction de l’oral vers l’écrit. L’utilisateur malentendant, en fonction de la situation et de ses besoins, lit l’ensemble des sous-titres ou seulement une partie, en support, afin de retrouver les informations qu’il n’aura pas entendues. Il sera ainsi en mesure de participer aux échanges s’il le souhaite.

Ce sous-titrage répond à des critères de qualité essentiels :

restituer fidèlement le propos
  s’afficher rapidement et régulièrement de façon à ce que la personne sourde puisse suivre à l’écrit à la même allure que ce qui se dit
  être compréhensible
pour ça, l’interprète s’attache à la ponctuation. Les points, les virgules, les points d’interrogation ajoutés donnent du sens à la phrase.

Pour arriver à ce résultat, il faut mobiliser de l’expérience, une grande concentration et une préparation : en amont, l’interprète de l’écrit s’attache à rassembler le vocabulaire en rapport avec le sujet qu’il aura à sous-titrer ; par exemple les noms des participants à une réunion professionnelle, à un colloque sur un thème spécifique…ou encore tout le jargon du sujet dont il sera question.

Cette tâche est soumise aux mêmes contraintes de confidentialité et de déontologie que celles de l’interprète en langue des signes. La transcription se fait à la vitesse de la parole qui varie de 120 à 250 mots par minute environ. Le décalage entre la voix et sa transcription sous forme de texte est donc très faible. C’est pourquoi, on parle souvent de « transcription simultanée » ou de « vélotypie », qui fait référence à une écriture rapide.

Les services de sous-titrage en direct du Messageur sont réalisés principalement à distance, grâce à internet. Pour des événements, nos interprètes de l’écrit peuvent travailler à distance ou sur place, souvent dans une cabine d’interprète, aux côtés des interprètes de langues.

Dans le cadre d’événements, les sous-titrages sont absolument nécessaires et sont utilisés par une grande partie du public. Plus d’1 personne sur 10 rencontre des difficultés d’audition à différents degrés.

Au Messageur, notre technique de sous-titrage s’appuie sur de la reconnaissance vocale

Un peu de technique… « Vélotypie » et « sténotypie » désignent généralement un sous-titrage réalisé à partir d’un clavier. Au Messageur, notre technique s’appuie sur de la reconnaissance vocale : l’interprète reçoit le son dans son casque-micro et il dicte ce qui doit s’écrire (mots, ponctuation, disposition du texte) pour traduire les propos tenus à l’oral ; on dit qu’il “speake”. Tout en “speakant” il corrige le texte qui s’affiche, issu de son “speak” sur un clavier classique.

Que corrige-t-il ? Le logiciel de reconnaissance vocale s’appuie sur une technique d’intelligence artificielle. Sosies phonétiques, noms propres doivent être ajustés au regard du contexte. Deux expressions peuvent s’énoncer de manière identique avec un sens qui diffère, en fonction de l’orthographe. De la même manière, l’intonation va apporter des nuances de sens qui rendent nécessaire le travail de ponctuation réalisé par l’interprète.

Lors de la dictée, il ajoute la ponctuation pour structurer ses phrases. Il s’agit d’une tâche relativement rapide, mais qui peut entraîner un décalage supplémentaire avec ce que dit l’orateur qui, lui, n’a pas à se soucier de la structuration de son discours. La ponctuation peut être introduite par commande vocale, avec les touches du clavier ou les deux, selon la préférence du professionnel qui sous-titre.

À quelles compétences le métier d’interprète de l’écrit fait-il appel ?

Un interprète de l’écrit doit faire plusieurs choses à la fois : mémoriser un message source, le répéter tout en continuant à écouter la suite du discours, insérer la ponctuation dans les phrases, lire ce qui s’affiche sur son écran d’ordinateur et corriger les éventuelles erreurs au clavier si besoin. Le processus mental en jeu – mélange d’oral et d’écrit – est complexe. Une pratique intensive et régulière est indispensable. Plus l’interprète de l’écrit pratique le sous-titrage, plus il est en mesure de jongler facilement entre les différentes tâches à accomplir. Il doit parvenir à un équilibre entre les volets linguistique, méthodologique et technologique.

Une diction parfaite est nécessaire pour dicter le texte au logiciel de reconnaissance vocale. Il faut être capable de dicter les mots en les prononçant correctement, en faisant attention à bien articuler. Souvent, l’interprète de l’écrit ne dicte pas comme il parlerait : pour que le logiciel commette le moins d’erreurs possible, l’interprète ruse à l’aide de techniques de « respeaking ». Il insiste sur certaines liaisons, découpe des syllabes, ajoute des pauses, trouve une prononciation pour certains mots qui varie du modèle acoustique du logiciel de reconnaissance vocale, etc.

Il doit aussi bien gérer le timbre de sa voix car si certains orateurs s’enthousiasment très facilement, l’interprète de l’écrit doit savoir garder son calme pour éviter de nuire à la qualité de la reconnaissance vocale.

L’interprète de l’écrit doit donc également être à l’aise en dactylographie. Les raccourcis clavier permettent d’avoir accès à toutes les commandes sans utiliser la souris, pour une meilleure productivité, un plus grand confort et un gain de temps indéniable.

Environ une cinquantaine de personnes en France exercent actuellement ce métier.

C’est un métier très différent de celui du sous-titrage dit « de stock », qui consiste à créer les sous-titres d’un film ou de programmes TV en différé, pour une diffusion qui ne se fait pas en direct.

Un sous-titrage réussi est un sous-titrage préparé

Pour maîtriser n’importe quel type de discours et d’orateur, le secret tient en un mot : la préparation (la « prépa », pour les intimes). La qualité de la transcription est proportionnelle à l’implication de l’interprète de l’écrit lors de cette étape. En recevant de la documentation à l’avance, il peut s’imprégner au préalable du sujet, faire des recherches ou poser des questions. Il ne se contente pas de transcrire, il a besoin de comprendre le contenu des échanges pour en restituer fidèlement le sens.
Il y a le sujet en lui-même, mais aussi le vocabulaire. L’interprète de l’écrit n’est pas expert dans un domaine de compétences, mais il lui suffit d’être bien préparé pour maîtriser la terminologie utilisée lors d’une conférence ou d’une réunion.

L’étude des document transmis, les recherches terminologiques personnelles et la rédaction d’un glossaire spécifique pourront demander à l’interprète de l’écrit jusqu’à plusieurs heures de travail de préparation, en amont de sa prestation. À cela s’ajoute la nécessité d’enrichir le dictionnaire du logiciel de reconnaissance vocale avec le nouveau vocabulaire et de tester un à un les mots en amont de la prestation.

Un sous-titrage réalisé dans le respect de règles de déontologie

Comme tout professionnel, l’interprète de l’écrit suit un ensemble de règles de déontologie et de conduite. Elles s’articulent autour de quatre grands principes :

  1. Fidélité de la transcription
    Il restitue un discours dans son intégralité, avec précision et fidélité, sans addition ni omission. Il transcrit les propos énoncés, restitue leur sens au plus près des nuances exprimées, respecte les différents registres de discours et contribue à la fluidité des échanges.
  2. Confidentialité et secret professionnel
    Les informations portées à la connaissance de l’interprète de l’écrit avant, pendant et après son intervention sont confidentielles. L’interprète de l’écrit s’en interdit toute exploitation personnelle. Le partage du secret professionnel ne peut se faire qu’entre interprètes intervenant sur une même prestation et dans l’intérêt du bon déroulement de la transcription.
  3. Impartialité
    L’interprète de l’écrit n’intervient pas dans les échanges qu’il transcrit, ses opinions ne transparaissent pas dans son intervention. Il exerce sa fonction avec impartialité, dans une posture de retrait. Sa transcription est loyale aux différents locuteurs.
  4. Respect de l’autonomie des personnes
    Il garantit une transcription fidèle aux paroles des interlocuteurs et non à leur intention supposée. Il n’intervient pas pour fluidifier les échanges en cas de malentendu. Il exerce sa profession avec recul et garde une posture distanciée.

Au Messageur, le fichier contenant le texte de la transcription – le « verbatim » – est transmis au client puis détruit.

L’enjeu majeur de la prise de son à distance

Un enjeu essentiel pour pouvoir sous-titrer à distance est de recevoir un son audible. Un travail de recherche & développement a été mené par Le Messageur sur la transmission d’un son de qualité et les bonnes pratiques de communication. Il s’agit de transmettre ce son vers les aides auditives des personnes malentendantes et vers l’interprète à distance en appliquant des règles de prise de parole qui permettent de recevoir un son audible : utilisation du « bâton de parole » en faisant circuler un micro qui induit également ce fonctionnement. Lors d’échanges multi-locuteurs, cette pratique permet de recevoir de manière intelligible le son de la voix de la personne qui parle (un locuteur à la fois). Cela requiert une rigueur dans la prise de parole qui améliore l’accès aux échanges. Seuls les propos prononcés dans le micro pourront être sous-titrés et transmis dans les appareils auditifs ou les implants cochléaires de la personne malentendante. L’interprète de l’écrit et la ou les personnes malentendantes bénéficiaires du sous-titrage partagent ce besoin. Les interventions réalisées hors micro sont signalées dans le texte par la mention *hors micro*.

Pourquoi l’intervention humaine est nécessaire en matière de sous-titrage ?

L’intelligence artificielle ne peut pas, ou en tout cas pas encore, remplacer le travail d’un interprète de l’écrit pour restituer de manière fiable le propos transcrit. La Fédération mondiale des associations de personnes malentendantes (IFHOH) et la Fédération mondiale des personnes sourdes (WDF) indiquent dans une déclaration conjointe qu’à ce jour, la reconnaissance vocale automatique ne peut remplacer une prestation de sous-titrage réalisée par un interprète, en raison d’une fiabilité insuffisante.

Cependant, le sous-titrage automatique, est un outil très utile au quotidien, quand les enjeux sont moindres, que la discussion ne comporte pas de termes techniques et que les locuteurs veillent à s’exprimer très distinctement.

Et au niveau international ?

Le Messageur prend part au projet Live Text Access, qui travaille à l’échelon européen sur le sous-titrage en direct, sur le métier d’interprète de l’écrit et sur ses bonnes pratiques. Il a notamment conçu un référentiel métier et un diplôme européen qui valide les compétences, quelle que soit la méthode utilisée pour transcrire (sténotypie, vélotypie ou transcription voix/clavier). Ce référentiel est disponible en ligne depuis la rentrée 2021.

Pour en savoir plus

 

Photo ci-dessus : Bucodes SurdiFrance, réalisée par Gwendal Le Flem

La boîte à outils de l’interprète de l’écrit

À quoi ressemble son poste de travail ? Quels sont ses outils du quotidien ?

Sur son bureau, on retrouve :

  • un casque audio avec microphone
  • un ordinateur principal
  • un ordinateur de secours allumé
  • une connexion internet
  • une connexion internet de secours disponible
  • un onduleur, en cas de coupure d’électricité (et oui, il faut prévoir tous les scénarios pour éviter l’interruption !).
  • assez d’écrans pour suivre simultanément sous-titrage, diaporamas, visio, vidéos, etc.
  • un smartphone, pour pouvoir échanger si besoin avec la régie technique
  • de l’eau pour ne pas perdre la voix en cours de route !

Le métier d’interprète de l’écrit, raconté par Florie

Le métier d'interprète de l'écrit, raconté par FlorieDécouvrez notre vidéo sur le métier d’interprète de l’écrit.

LA R&D DU MESSAGEUR

Sonore

Améliorer la qualité du son, focaliser la voix de la personne qui parle, la transmettre directement dans les écouteurs des aides auditives en supprimant, au passage, le brouhaha ambiant… Le Messageur travaille depuis ses débuts sur les besoins sonores des personnes malentendantes.

La technique son du Messageur

Sociologique

La communication est l’affaire de tous. Nous avons expérimenté les usages et techniques de régulation de la parole qui rendent possibles des échanges inclusifs et une accessibilité durable. C’est un pilier essentiel que nous intégrons dans toutes nos solutions.

Pratique

Des solutions pour toutes les situations qui requièrent de l’accessibilité, ça veut dire que l’ergonomie doit être au rendez-vous. Notre recherche va dans le sens de rendre les dispositifs disponibles et fonctionnels, mobiles et légers possible.

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